Mercredi 20 mars, 14h00
Amphi 5 de la Faculté de Sciences et Technologies de Nancy
Giovanni Manfredi (Institut de
Physique et Chimie des Matériaux de Strasbourg) présentera une conférence sur le thème
Antimatière
et gravitation : une affaire lourde de conséquences
Le concept d’antimatière – un monde miroir,
identique, mais opposé, au nôtre – a toujours exercé une
certaine fascination sur les auteurs de science-fiction, depuis le
vaisseau spatial Enterprise
de la série Star Trek (propulsé à l’antimatière) jusqu’au
roman Anges et Démons
de Dan Brown, où le Vatican risque d’être pulvérisé par une
réaction d’annihilation matière-antimatière. Pourtant, nos
connaissances sur l’antimatière ne sont pas nouvelles. Déjà en
1928, le physicien britannique Paul Dirac prédisait l’existence
d’une particule identique à l’électron, mais dotée de charge
positive. Cet anti-électron, nommé par la suite positron,
fut découvert expérimentalement en
1932 par l’américain Carl Anderson en étudiant les traces de
rayons cosmiques. Depuis, on est capable de produire en laboratoire
des anti-protons, des anti-neutrons, voire même, depuis 1995, des
atomes d’anti-hydrogène. En juin 2011, l’expérience ALPHA du
CERN a annoncé qu’elle avait réussi à piéger un millier
d’atomes d’anti-hydrogène pendant plus de 16 minutes – une
durée de vie suffisamment longue pour que l’on commence à étudier
en détail les propriétés de ces anti-atomes.
Une
question, en particulier, taraude les physiciens : est-ce que
l'antimatière tombe à la même vitesse que la matière ordinaire,
ou se comporte-t-elle différemment ? Voire même,
tomberait-elle vers le haut plutôt que vers le bas, comme la matière
ordinaire ? En dépit de nos connaissances de longue date sur
l’antimatière, cela n'a jamais été mesuré directement par des
expériences. Toutefois, deux nouvelles expériences du CERN –
ALPHA-g et GBAR – vont à présent commencer leur exploration en
vue de répondre à cette question. Même une petite différence
entre l’accélération de gravité de la matière et de
l’antimatière constituerait un résultat lourd de conséquence
pour la physique fondamentale. De surcroit, si l’on observait une
gravité répulsive pour l’antimatière (correspondant à une masse
négative pour cette dernière), cela
aurait des répercussions importantes sur plusieurs notions de la
cosmologie moderne, telles que la matière et l’énergie noires.
Bref,
même si l’antimatière ne nous permet pas encore de voyager dans
l’espace ni (heureusement) de produire des bombes hyperpuissantes,
elle pourrait bientôt nous aider à répondre à des questions
fondamentales sur la nature de notre univers. Et c’est bien le but
de la science !